Homélie pour la saint François d’Assise - Olivier Jelen

, par Pierre

Chers frères et sœurs en Christ, ou aussi bien-aimés du Seigneur,

La liturgie catholique nous offre un texte très intéressant en ce week-end du 3 et 4 octobre. Ce dimanche qui marque aussi la fête de la saint François d’Assise. Ce dimanche, précisément le 4 octobre, qui marque encore et toujours la journée mondiale des Animaux. Saint François en effet, déclaré patron de l’Ecologie, doit être aussi vu comme le protecteur des animaux. Et vous le savez, j’affectionne particulièrement cette date, cet événement. C’est toujours une joie de nous savoir uni, côte à côte, bêtes et hommes. N’avons-nous pas reçu un même souffle de vie ? N’avons-nous pas été crée le même jour que les animaux, à savoir le 6° jour ? Uni aussi pour célébrer Dieu, placer notre relation sous le regard de Dieu. Louer Dieu, le Créateur de tous… Dieu a donc crée l’Homme, explique notre texte. Et il n’a pas voulu que l’Homme reste seul. C’est déjà une constatation importante. L’Homme, comme le rappelle la Tradition juive, n’est pas fait –du moins dans la majeure partie des cas- pour vivre seul, isolé. Nous sommes des êtres de relations. Même l’ermite, tel Saint Gall et l’ours ou saint Jérôme et le lion, mais je pense aussi à saint Nicolas de Flüe, patron de la Suisse, homme de paix, ne vivaient pas seul, ils restaient en contact avec l’extérieur, et on venait souvent de loin pour les consulter… Sans parler de leur prière pour nous tous… Nous sommes en fait crée à l’image de notre Créateur. Comme chrétien, nous avons cette spécificité de ne pas croire en un Dieu seul. Nous ne croyons pas en un Dieu auto-suffisant, sorte de démiurge. Dieu s’est révélé, surtout à travers Jésus-Christ comme un Père. Mais Dieu est aussi Fils et Esprit-Saint. Il est communion distincte et en même temps indissociable entre ses différentes personnes.

« Le Père est l’ultime source de tout, fondement aimant et communicatif de tout ce qui existe ». C’est l’encyclique Laudato Si du pape François qui le rappelle. « Le Fils, qui le reflète, et par qui tout a été créé, s’est uni à cette terre quand il a été formé dans le sein de Marie. L’Esprit, lien infini d’amour, est intimement présent au cœur de l’univers en l’animant et en suscitant de nouveaux chemins ». On le perçoit donc bien dans ce projet de Dieu, les trois unités sont fortement liées. « Le monde a été créé par les trois Personnes comme un unique principe divin, mais chacune d’elles réalise cette œuvre commune selon ses propriétés personnelles. C’est pourquoi « lorsque [...] nous contemplons avec admiration l’univers dans sa grandeur et sa beauté, nous devons louer la Trinité tout entière ». Ce numéro 169 de l’encyclique est superbe. L’Homme aussi est donc invité à entrer dans cette communion de Dieu. Il ne serait complet qu’à travers l’autre, son prochain, celui qui se trouve sur son chemin de vie… Et Dieu a donc crée, je reprends notre texte fondateur dans la Genèse, ce premier livre de la Bible, pour ne pas laisser l’homme seul, les animaux. « Les bêtes de champs », remarquons ici que ce sont des êtres utilisés par l’homme et « les oiseaux du ciel », là, il n’y a pas d’utilité direct de l’Homme. Il y a de la gratuité. Ces oiseaux vivent pour eux-mêmes ou plutôt pour la louange de Dieu, non pas pour l’Homme. Ou comme le dit One Voice : « Chaque vie possède une valeur intrinsèque indépendante de l’utilité qu’elle peut représenter pour les intérêts et les jugements des humains. Chaque vie est porteuse d’une volonté de poursuivre sa propre existence ». Si nous traduisons autrement, nous pouvons donc dire, en pensant aux oiseaux que l’animal a sa propre raison d’être. Il a aussi sa place indépendamment de l’Homme. Imaginons un instant cet espace de création. Adam, prototype de l’Humanité qui voit comme un à un les animaux défiler devant lui. Et à cette époque, il n’y avait pas de heurts, de violence entre les êtres vivants. Tout se vivait en parfaite harmonie. Il n’y était pas question de dominance. Adam devait être dans l’émerveillement continuel. Voir ces animaux défilés un à un avec leur plumage, avec leur poils de toutes les couleurs. La variété des animaux est si belle.

L’encyclique au numéro 24o dit ceci : « Les Personnes divines sont des relations subsistantes, et le monde, créé selon le modèle divin, est un tissu de relations ». Notre texte de l’Ecriture Sainte nous le dit bien. Je continue le numéro : « Les créatures tendent vers Dieu, et c’est le propre de tout être vivant de tendre à son tour vers autre chose, de telle manière qu’au sein de l’univers nous pouvons trouver d’innombrables relations constantes qui s’entrelacent. Cela nous invite non seulement à admirer les connexions multiples qui existent entre les créatures, mais encore à découvrir une clé de notre propre épanouissement. En effet, plus la personne humaine grandit, plus elle mûrit et plus elle se sanctifie à mesure qu’elle entre en relation, quand elle sort d’elle-même pour vivre en communion avec Dieu, avec les autres et avec toutes les créatures. Elle assume ainsi dans sa propre existence ce dynamisme trinitaire que Dieu a imprimé en elle depuis sa création. Tout est lié, et cela nous invite à mûrir une spiritualité de la solidarité globale qui jaillit du mystère de la Trinité ».

La Trinité, je reprends est donc un passage qui nous permet d’accéder à cette union de l’Homme avec les autres êtres crées, les autres êtres vivants tels les animaux. L’homme n’est pas fait pour vivre seul, les animaux non plus. Il y a une complicité entre les deux. On pourrait peut-être même prétendre que l’Homme n’est pas vraiment homme sans le lien avec l’Animal. Il a besoin de l’animal pour être à 100% homme. Et pour l’animal c’est la même chose. Je le vois de manière particulièrement éclairante dans la relation de l’Homme avec le chat ou le chien. Le chien va chercher d’être en compagnie constante avec son maitre. Le chien sans son maître reste un être anxieux et dépressif. Faut-il rappeler ici l’histoire du chien japonais Hatchi qui se laissa presque mourir de faim ne voyant pas son maitre revenir ? L’engagement envers l’animal qui nous complète donc, est aussi un impératif de justice. La non-violence est un marqueur du Royaume de Dieu. Toute violence qui se fait entre les humains eux-mêmes ou entre les différentes espèces elles-mêmes devient contre-témoignage. Puissions-nous élargir notre compréhension de l’animal à celui d’un être et d’une sœur frère. Ou comme le disait saint François, l’animal devient le frère cadet de l’homme. Puissions-nous entrer dans cette dynamique qu’avait déjà entrevue saint François d’Assise. Amen.